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Que coûte une insulte?
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L'insulte lancée par Nicolas Sarkozy à un homme qui refusait de lui serrer la main a fait le tour de la planète.
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Un tribunal helvétique infligerait plusieurs centaines de francs d'amende pour un «pauvre con» à la Sarko
Renaud Michiels - 26/02/2008
Le Matin
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«Casse-toi pauvre con.» L'insulte lancée samedi par Nicolas Sarkozy à un homme qui refusait de lui serrer la pogne a fait le tour de la planète. Mais que risque-t-on, en Suisse, si on se met à imiter le président français? «En l'état de la jurisprudence, «pauvre con» est clairement une attaque directe à l'honneur d'une autre personne», commente Jean Treccani, substitut du juge d'instruction cantonal vaudois. «En Suisse, il s'agit donc d'une injure au sens du Code pénal. En cas de plainte, l'insulteur risque théoriquement une peine d'au maximum 90 jours-amendes.»
En fonction des revenus
Ça nous fait combien l'insulte? «Le montant sera calculé en fonction des revenus et de la fortune, explique le magistrat. Le juge devra aussi apprécier la virulence de l'attaque et une bordée de noms d'oiseaux sera plus sévèrement sanctionnée qu'un petit dérapage verbal. Mais, en gros, la personne reconnue coupable d'injure écopera de un à cinq jours-amendes valant chacun entre 50 et 300 francs en moyenne. Plus les frais d'enquête: un bon millier de francs.»
Le juge vaudois précise qu'en matière d'insulte, le juge a une grande marge de manoeuvre. «C'est difficile à apprécier car il existe des injures plus fortes que d'autres et chacun, selon son éducation ou sa génération, connaît ses propres limites. Et le vocabulaire évolue: est-ce que «bouffon» est encore une insulte aujourd'hui? Probablement pas...»
Reste que les magistrats ne passent pas leur temps à soupeser la gravité d'un affront. «L'immense majorité des cas sont réglés lors de tentatives de conciliation, explique Jean Treccani. S'il accepte de s'excuser, le coupable versera simplement 100 à 200 francs à une oeuvre de bienfaisance.»
Autre spécificité du droit suisse, un «sale con» annule un «p'tit con». Le Code pénal stipule en effet que, «si l'injurié a riposté immédiatement par une injure, le juge pourra exempter de toute peine les deux délinquants». Un partout, la balle au centre.
Immunité pour Couchepin
Et si un Pascal Couchepin ou un Moritz Leuenberger se mettait à lancer des «pauvre con» à tout va? «Comme le président français, les conseillers fédéraux ont une immunité, qui ne peut être levée que par le Parlement, explique l'avocat genevois Charles Poncet. Concrètement, ils seraient à l'abri de l'amende. Par contre, le prix politique serait élevé. La Suisse n'a pas vraiment la culture de l'insulte...»
«Salopard», «crevure», «psychopathe» ou «connard de Vercorin»
Les tribunaux ne sont pas encombrés par des plaintes pour injures. Mais on trouve tout de même quelques jolies agressions verbales dans la jurisprudence du Tribunal fédéral (TF). Les classiques: «salopard» et «trou du cul». Les recherchés: «mongol», «crevure» ou «psychopathe». Et l'exotique: «connard de Vercorin»...
Voici trois exemples de verdicts rendus avant l'instauration des jours-amendes (1er janvier 2007).
«Le système a changé mais on déboucherait encore aujourd'hui sur des peines comparables», commente Jean Treccani, le substitut du juge d'instruction cantonal vaudois.
Pétasse: Une automobiliste vaudoise a le malheur d'arriver un peu vite dans le garage commun de son immeuble? Son voisin la traite de «pétasse». L'indélicat écopera de 300 fr. d'amende. Peine confirmée par le TF en 2001.
Connard: Toujours dans le canton de Vaud, une histoire de vélo encombrant l'accès à un commerce dégénère. Le propriétaire de la bicyclette envoie un «connard» au commerçant, accompagnant ses propos d'un doigt d'honneur - les gestes peuvent aussi être considérés comme des injures. Son amende de 500 fr. a été confirmée fin 2005.
Connasse: «Merdeux», «connard» ou «saloperie». Deux couples se déchirent pour une question de place de bateau entre Genève et Lausanne. Ils se balancent une série d'insultes à travers la figure. Pour un «connasse» suivi d'un «salope de bonne femme», un des protagonistes écope de 300 fr. d'amende. Peine approuvée par le TF en été 2005
http://www.lematin.ch/pages/home/actu/a ... enu=390386
et pour "tu me salis" combien ?